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  • Photo du rédacteurLoane Nader

Anas Khalaf - producteur Syrien

CI-NÉE eu la chance de nous entretenir avec Anas Khalaf, un producteur Syrien réfugié depuis maintenant 6 ans en Jordanie avec sa femme et ses deux enfants. Cette dernière, Rana Kazkaz, fait également parti du milieu cinématographique puisqu'elle a travaillé sur Mare Nostrum en tant que scénariste et réalisatrice.


Mare Nostrum a été acclamé par le public avec une sélection pour le Sundance Film Festival en 2017, et une nomination aux Césars en 2018. Vous vous attendiez à un tel succès ? Qu'en avez-vous retenu ?


A.K : On ne s’attendait pas à un tel succès, évidemment ! Ça a été une des émotions les plus fortes car le public partout dans le monde (49 pays) a répondu avec force à cette histoire, nous sommes très émus et touchés par tant de compassion envers cette cause.

Mare Nostrum, qui se déroule au large de la côte Turque, est l'histoire d'un père Syrien qui prend la dure décision de jeter sa fille à l'eau, laquelle ne sait pas nager, afin de la préparer à traverser la Méditerranée pour rejoindre l'Europe. Pourquoi avoir choisi de mettre vos personnages dans cette situation et pas une autre ? 


A.K : Nous avons été très affectés par les drames des réfugiés en méditerranée et nous voulions avant tout raconter notre version du drame, qui se déroulait sur les écrans de télévision du monde entier et aux yeux de tous. Nous ne supportions également plus d’entendre les jugements des européens sur le choix que font ces familles d’aller a la mer et souvent d’y mourir, la clef justement c’est qu’ils n’ont pas le choix. Comment fait-on pour aller jusqu'au bout d'un projet qui nous tient tant à cœur et qui raconte presque notre propre histoire ?

 

A.K : Il faut avoir une vision claire de ce qu’on veut raconter, de la persévérance et beaucoup de patience; ainsi va le cinéma, il ne faut jamais lâcher car les occasions et les tentations d’abandonner sont nombreuses au court de ce long chemin. 


Votre fille Zayn joue la petite fille dans le film. Quels sont les avantages et les inconvénients à diriger sa propre fille ?


A.K : Au début nous avions casté une autre fille car Zayn ne voulait pas jouer le rôle, puis elle a changé d’avis en même temps que nous nous soyons rendu compte que la fille castée et Ziad Bakri, l’acteur principal, n’avaient pas l’alchimie souhaitée. C’est donc comme ça que Zayn s’est retrouvée dans le film. Nous avons beaucoup parlé et échangé avec elle a propos du conflit en Syrie et de la situation de ces familles en perdition dans une mer hostile, ça a été un processus long mais au final fructueux.


Dans Mare Nostrum, l'image est très belle, très soignée et cela fait contraste avec la situation des personnages. Quel est le but de ce choix cinématographique ?

 

A.K : Exactement ça, de contraster le beau de l’image que l’on reçoit en plein visage et l’horreur de la souffrance humaine que l’on absorbe en plein cœur.


Mare Nostrum est un film quasi muet. Pourquoi avoir fait le choix de ne pas faire parler vos personnages ? 


A.K : Le cinéma est art visuel. On a toujours préféré les films avec le moins de dialogues possible, car l’essentiel des émotions et des échanges entre les humains ne se transmet pas par la parole. C'était un exercice compliqué, mais ça valait le coup !


Vous avez vous-même fui Damas avec votre famille. Comment vous expliquez à vos enfants que leur pays d'origine à été détruit par la guerre ?

 

A.K : Nous essayons de leur raconter l’histoire de ce qui s’est passé sans jugement et avec le plus de compassion possible, leur grands parents habitent toujours là-bas, ça sert a expliquer les choix extrêmes de chacun pendant un tel conflit.


Vous êtes aussi producteur de Jour Sourd, qui cette fois-ci se passe en Syrie et dans une autre situation. Le film raconte l'histoire d'une mère qui prépare son fils de 5 ans, sourd et muet, à sortir de sa chambre et explorer le monde extérieur. Quel rapport avez vous avec la surdité, est-ce que ce handicap vous touche particulièrement ?

 

A.K : Ni moi ni ma famille sommes touchés directement par ce handicape, mais les syriens si ! En effet il y a 6 fois plus de naissances d’enfants sourds en Syrie que dans le reste du monde, ceci étant du aux mariages consanguins, un phénomène et un fléau au moyen orient. Nous voulions raconter l’histoire d’une mère qui ne veut pas cacher son enfant et l’enfermer afin que la société ne voit pas son handicape, pratique très courante dans la société syrienne, c’est une combattante contre les préjugés de cette société ultra sectaire et profondément intolérante.


Dans vos deux films Mare Nostrum et Jour Sourd, les personnages centraux sont des enfants. Est-ce une coïncidence ou y a-t-il une raison derrière cela ?

 

A.K : Nous avons fait deux autres films, Kemo Sabe et Ham, eux aussi avec des enfants comme protagonistes, nous aimons raconter des conflits familiaux et bien sûr avec des enfants au cœur de ces conflits. Vos films dépeignent jusqu'à présent uniquement des personnages Syrien. Pourquoi ?

 

A.K : Il y a très peu de productions syriennes, que ce soit longs ou courts métrages de fiction ou même documentaires. C’est pour cela que nous voulions raconter des histoires syriennes. Maintenant que les réfugiés syriens à l’étranger se comptent en millions, il y a eu un boom dans les productions cinématographiques syriennes et mes films syriens sont de plus en plus présents non seulement dans les festivals internationaux mais aussi dans les circuits de distributions en salles. Une aubaine !


Pouvez-vous nous parler de votre prochain projet ?


A.K : C'est notre premier long métrage de fiction; tournage a l’été 2019 en Jordanie et en Australie. Le film parle de deux frères qui évoluent pendant le début de la révolution syrienne en mars/avril 2011. Le titre : Le Traducteur.

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